Journal d’un écrivain en pyjama – Dany Laferrière

J’ai mis à peu près aussi longtemps à écrire cet article qu’à lire ce livre, et pourtant Dieu sait que je l’ai aimé.

Je l’ai trimballé avec moi dans les transports pendant plus d’un mois, il a souffert avec moi de mon humiliante glissade en bas des escaliers de ma station de métro et en garde encore les séquelles, et comme si cela ne suffisait pas, j’ai encore corné ses pages, souligné ses meilleures phrases au crayon à papier, et tout cela sans avoir pris le temps de lui accorder la chronique qu’il mérite sur ce blog.

Journal d’un écrivain en pyjama

Auteur : Dany Laferrière
Editeur : Grasset
Publié le : 4 septembre 2013
Genres : Essai
Pages : 320

C’est un essai qui se voudrait un roman et qui se donne le titre de journal, toutes contradictions assumées par un auteur qui ne manque pas de verve.

«Pourquoi faites-vous ça ? — Parce que c’est mon livre, je fais ce que je veux. Je le réécris comme je veux. S’il est mauvais, c’est votre droit de le dire. Mais vous ne m’empêcherez pas d’y toucher.» Long silence. «C’est votre livre, bien sûr, mais comme lecteur… — Le lecteur a acheté le droit de le lire, pas le droit de l’écrire, ni de me dire comment l’écrire.»

Journal d’un écrivain en pyjama est un concentré de conseils pour aspirants écrivains, tiré de l’expérience d’écrivain de Dany Laferrière ainsi que de ses réflexions de lecteur. Le ton n’est jamais pompeux ni donneur de leçon, cela ressemble davantage à une conversation entre amis ponctuée d’anecdotes intimes et d’autodérision.

Ecrire c’est une énergie bien dosée, car trop d’énergie vous pousse vers la rue, et trop peu vous oblige à rester au lit. Vous remarquerez que l’écrivain en panne d’idée se croit toujours obligé de définir l’écriture.

Pour autant, je vous incite vivement à le lire même si vous n’avez pas de velléités littéraires : c’est aussi un anti-Droits imprescriptibles du lecteur (cf. Comme un roman). Ce qui tiraille d’ailleurs quelque peu la fan de Pennac en moi, ne parvenant pas à prendre parti entre le droit de ne pas finir un livre qui nous ennuie et l’obligation morale de donner une seconde chance à ce dernier, ne serait-ce que pour retenir les leçons de ce qui ne m’aura pas plu ou pouvoir le critiquer en toute légitimité.

Enfin, Journal d’un écrivain en pyjama regorge de pistes de lectures qui ne se limitent pas aux classiques et à Jorge Luis Borges qui pourrait faire l’objet d’un jeu à boire (un verre à chaque référence, je vous garantis la cuite de votre vie en fin de lecture) tant il est cité par l’ami Dany (avec tout le respect qu’on doit à un Académicien).

J’ai entre autres noté Mumbo Jumbo d’Ishmael Reed (parce qu’il faut bien reconnaître qu’un “délire jazzé” mêlant vaudou et surréalisme, cela suscite a minima la curiosité) ou La couronne de plumes d’Isaac Bashevis, dont je n’avais à mon grand regret jamais entendu parler ailleurs.

Et l’aventure ? L’aventure, l’aventure, on n’est pas dans Dumas ou dans Stevenson, on ne court plus les mers pour découvrir de nouvelles terres. L’aventure c’est rendre possible la découverte de nouveaux paysages intérieurs.

Vous me direz qu’il est curieux de lire les conseils d’écriture d’un auteur qu’on n’avait encore jamais lu, c’est pourtant mon cas avec ce Journal d’un écrivain en pyjama et cela n’aura fait que m’inciter plus avant à lire ses romans qui m’avaient par ailleurs été chaleureusement recommandés.

A vos commentaires !
Avez-vous déjà lu Dany Laferrière ? Lequel de ses romans me conseillez-vous de lire ensuite ?

Source de la photo (Dany Laferrière lisant dans une baignoire) : Yvette Neliaz

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3 commentaires

  1. Pas lu encore les romans de Laferrière, mais je vois que nous avons fait le même parcours de lecture…

    (salutations, et merci pour ce billet de novembre sur les Couvertures (je m’abstiens tjs de commenter, mais j’avais vu^). bonne suite, et bons voyages)
    secondflore Articles récents…Le métro reste un sport collectifMy Profile

    • Mais je vous en prie, j’avais beaucoup apprécié Sous les couvertures. Le métro est un sport collectif est toujours en bonne position dans ma liste “à lire” et je ne doute pas que sa lecture m’apportera autant de plaisir ! (Il faut croire que j’ai pour habitude de remonter les bibliographies d’auteurs à reculons 🙂 )

  2. Excellente idée : arrivé au premier roman, on profite de sa fraîcheur tout en voyant, encore en germe, ce que deviendra l’auteur ensuite. Double plaisir.
    (je ne parle pas pour moi, là, hein – je sais bien que le meilleur sera le suivant ;))

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