Si je devais comparer Le congrès, ce serait à L’odyssée de Pi, pour son côté allégorique et sa recherche visuelle. Le congrès n’est pas un film comme on a l’habitude d’en voir. Oubliez vos clichés sur l’animation, et si comme moi, la bande-annonce vous intriguait, sachez que dans son intégralité le film vous déconcertera plus encore que vous ne pouviez l’imaginer.
Robin Wright, port altier et beauté digne, y joue son propre rôle : celui d’une actrice vieillissante dont la carrière menace de toucher à sa fin si elle refuse de se laisser scanner pour céder sa place et ses choix de films à son avatar animé. Après 20 ans qu’elle passe à se consacrer à ses enfants (dont son fils atteint du syndrome d’Usher qui le rend progressivement sourd et aveugle), elle se rend au congrès de sa major, et découvre un univers entièrement animé où la frontière entre le fantasme et la réalité devient de plus en plus floue.
Grâce aux Chroniques de Cliffhanger, j’ai eu la chance de voir le film en avant-première dans le cadre du festival Paris Cinéma, présenté par le réalisateur Ari Folman lui-même, qui nous a dit avoir pris quelques libertés avec l’intrigue originale du roman de Stanislas Lem dont le film est une adaptation, et avoir vu dans la science-fiction une façon de s’évader après Valse avec Bachir. Le congrès n’est pas pour autant un film léger, ni facile d’accès : je l’ai aimé pour les mêmes raisons qui m’ont fait adorer No, à savoir toutes les pistes de réflexions qui en découlent.
Porté par une musique qui sait se faire tour à tour épique et bouleversante, Le congrès va jusqu’au bout des possibilités offertes par l’animation : rajeunir ou même ressusciter légendes du grand écran et figures mythiques et/ou mythologiques, repousser les limites du réel, et surtout cumuler les métaphores au service d’une réflexion sur l’éthique et les avancées technologiques, l’avenir du cinéma, et bien sûr le vieillissement. Faut-il choisir l’art et l’imagination comme échappatoires à la réalité au risque d’ignorer la vérité ? Jusqu’à quel point l’identité d’un acteur lui appartient, est-elle construite de toute pièce par l’industrie cinématographique, les médias, les constructions imaginaires du public ou l’individu a-t-il encore prise sur son image ?
Peut-être (sans doute) verrez-vous encore d’autres questions dans Le congrès : après tout, à chacun son interprétation, ses projections en fonction de son vécu. Et si vous avez de la chance, vous en sortirez même dans cet état de flottement qui laisse la place à l’imagination pour remplir le vide d’un trajet en métro de fleurs, d’animaux étranges et de stars de cinéma. Une chose est certaine, vous n’en sortirez pas indifférent.
Un très bon film, qui m’a beaucoup ému. Et un discours intelligent sur la réaction d’un parent face à la maladie qui plus est.
Persistez dans cette direction, c’est un véritable bonheur de vous lire.